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Phénoménologie de la donation Entretien avec Jean-Luc Marion
di Fausto Fraisopi

 

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Jean-Luc Marion est un des plus importants philosophes contemporains. Né en 1946, élève de l’Ecole Normale Supérieure (1967-1971) a été parmi les fondateurs de l’édition française de la revue « Communio ». Il enseigne à l’Université « La Sorbonne » de Paris et à l’Université de Chicago. Il représente, déjà depuis plusieurs années, un membre de première ligne de la tradition phénoménologie française du XX siècle − dont on peut rappeler Ricoeur, Levinas, Derrida, Henry −  avec lesquels il a souvent débattu et collaboré. Historien de la philosophie et philosophe en même temps − pour Marion la spécularité entre activité d’interrogation de la tradition et philosophie en « première personne » s’est toujours démontrée nécessaire − a consacrée son œuvre à une tension extrême, l’on pourrait dire à une exténuation (jusqu’à l’inversion) du concept phénoménologique fondamental de l’intentionnalité comme activité distinctive d’un pole égologique (et métaphysique). En ce sens, en conduisant l’intentionnalité à son exténuation, il ouvre la voie à l’anamorphose, à ce que, comme l’on verra dans l’entretien, peuvent être définis comme « les phénomènes invisibles ». Dans la conscience de l’oxymoron, de la contradiction que l’affirmation d’un phénomène invisible représente pour un pole égologique qui se prétend constituant, Jean-Luc Marion oriente ses interrogations et ses analyses dans un horizon qu’est celui ouvert par la crise de la métaphysique onto-teo-logique. Seulement à l’intérieur de cet horizon, pour Marion, on peut récupérer ces thèmes théologiques de la tradition biblique et chrétienne qui, en régime d’opposition entre fides et intellectus, avaient été objet d’une radicale « rémotion »  par la philosophie moderne de l’ego. Pour cette récupération on a lui adressée la critique (notamment par Dominique Janicaud) de mettre en œuvre un « tournant théologique de la phénoménologie » mais…comme l’on sait très bien, au-delà des « slogans », la « chose même » de la philosophie se démontre beaucoup plus complexe. A la naissance de l’égologie métaphysique est consacrée la trilogie sur Descartes, dont Marion est un des interprètes plus actifs et profonds. En cette direction s’orientent aussi, mais selon l’instance théorique, trois œuvres comme Reduction e donation, e Etant donné et De surcroît : ici Marion analyse une voie de dépassement de cette égologie, une voie déjà indiquée par la phénoménologie husserlienne et par Heidegger. En cette direction se déploie la découverte et la définition du « phénomène érotique », une réflexion très profonde sur les thèmes capitaux de la subjectivité et sur sa possibilité d’ouverture à l’expérience, une possibilité qui se trouve proprement dans le « phénomène érotique ». Les six méditations de « Le phénomène érotique » sont pensées et modelées sur l’itinerarium mentis des « Meditationes de prima philosophia » de Descartes et des « Cartesianischen Meditationen » de Husserl − comme à en représenter un achèvement après la chute, le collapse de l’égologie  métaphysique. Au-delà d’une interprétation naïve, très souvent fournie, les six méditations représentent une interrogation philosophique radicale sur les thèmes de l’ouverture du sujet au monde (ou, pour mieux dire, du monde au sujet), sur l’intersubjectivité, sur le dépassement du caractère vain de la dimension mondaine (la vanitas), sur ce Dieu qui − en avance sur « Deus Caritas est » de Benoît XVI − s’avance à nous, nous se révèle, « nous précède toujours comme meilleur amant ». « Le phénomène érotique », lié aux idées directrices de son chemin spéculatif précèdent − « Dieu sans l’être », « Prolégomèes à la charité », « La croisée du visible », « Le visible et le révélé », « L’idole et la distance » − représente à notre avis un « nouveau commencement » de la pensée de Jean-Luc Marion, comme ils le démontrent des ouvrages successifs et ceux en projet. L’admissibilité ou la non admissibilité de cette inversion de l’intentionnalité, de cette inversion de la dynamique selon laquelle c’est le monde qui s’ouvre au sujet, l’acceptation des thèmes, des questions et des solutions que Son œuvre définit est, comme toujours, objet d’une interrogation philosophique ultérieure. Nous le remercions pour la sympathie et la disponibilité et l’attention qui le caractérise toujours.

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1) Monsieur Marion, dans « La croisée du visible et de l’invisible » Vous soulignez comment dans l’art perspectiviste de la Renaissance, se maintient encore une spécularité entre la perspective et l’anamorphose, spécularité qui arrive encore à réaliser une croisée entre le visible et l’invisible. Or, dans la constitution de la subjectivité moderne − appuyée aussi sur la constitution de la géométrie et sur le paradigme d’une phénoménalité pauvre, se perte le caractère d’anamorphose de la phénoménalité. Comment peut la phénoménologie de la donation récupérer et puiser cette anamorphose ?

Marion - Le problème de l’anamorphose se place à l’intérieur du problème de l’intentionnalité naturellement. Dans les débats contemporains sur l’intentionnalité il y a deux questions qui se posent, d’un part plus habituellement celle de la naturalisation ou non de l’intentionnalité mais ce débat reste à l’intérieur du caractère simplifiant de la connaissance et donc les débats sur la naturalisation de l’intentionnalité sont secondaires ; ce qui est plus important c’est une question qui est posé essentiellement, à ma connaissance, par Emmanuel Levinas et par Michel Henry, peut être pourrait on remonter à Heidegger mais quand même, une question qu’est comment on peut remonter au renversement de l’intentionnalité, c’est-à-dire d’avoir une intentionnalité qui se verserait de la chose sur moi. Le fait est que cette inversion possible est-elle introduite essentiellement dans le rapport à Autrui, comme dit Levinas, et d’une certaine façon dans le rapport à moi même comme chair, comme auto-affection chez Michel Henry. Ce qui n’avait été pas clairement tenté, à mon avis, c’était que ce soit vraiment le rapport à la chose même qui envers l’intentionnalité, la chose qui je ne suis pas, et pas non plus Autrui seulement. Ce qu’ai tenté de faire avec l’anamorphose. L’anamorphose consiste à dire que certains phénomènes ne peuvent être vus que en modifiant, en imposant au sujet de modifier son propre point de vue sa propre position par rapport à la chose même selon le modèle de l’anamorphose de la peinture où il faut se mettre dans un certain endroit pour voir apparaître le phénomène. Il en est de même pour certains phénomènes, et cette question, directement liée bien entendu à la question de la facticité, à la question de l’Etre-au-monde, qui fait que le phénomène impose que je me place d’un certain de vue pour le voir et si non je reçoit les mêmes informations mais je ne vois pas. C’est peut-être une problématique liée à l’herméneutique à condition de penser que l’herméneutique n’est pas une interprétation de la chose par moi mais d’une certaine manière, plus essentiellement, l’interprétation de moi par la chose.

2) Une autre paradigme de la subjectivité que la phénoménologie de la donation prétend de dépasser et d’avoir dépassé est (le concept de) l’horizon comme provenant, comme projeté par un Je transcendantal et par ses rayons d’intentionnalité. Ca passe par l’abandon du « principe de tous le principe » mis en œuvre par le principe qui Vous avez formulé : « autant de réduction, autant de donation ». Mais il en va ici d’un abandon, d’une négation ou d’un dépassement au sens de l’Aufhebung hégélienne ?

Marion - La question des principes de la phénoménologie est une question ancienne, Husserl en a proposés au moins trois et Heidegger d’ailleurs a plus ou moins utilisé ces différents principes mais il est clair que le principe de tous les principes d’Husserl de Idéen I § 24 est susceptible d’une critique radicale du point de vu phénoménologique lui-même. Pourquoi ? Parce que d’une part il assume sans la critiquer en aucun moment l’équivalence entre l’évidence et la phénoménalité, la manifestation ce qui d’une certaine façon gomme entièrement l’hypothèse soit d’une alhqeia soit d’un refus de la vérité, au sens augustinien. Deuxièmement, ce principe curieusement précède formulation et  la pratique de la réduction et donc d’une certaine manière il se donne à la fois comme originel et antérieur à la réduction de la thèse naturelle, qui est quand même une contradiction grave. Troisièmement il est entièrement gouverné par la notion de l’évidence et du remplissement et donc par donc par la notion d’intentionnalité et, donc, par la notion de subjectivité transcendantale. Donc le principe il ferme la porte à la possibilité d’une phénoménologie non transcendantale. C’est pourquoi j’ai risqué un double mouvement qui est d’une part de substituer à l’évidence, c’est-à-dire au but du compte à l’intuition, la donation, la donation englobant non seulement l’intuition mais même la signification ou les essences et donc la donation intégrant dans la manifestation l’ensemble des déterminations du phénomène et pas seulement l’intuition. Réduction donc et deuxièmement donation, un principe qui soit à l’intérieur de la réduction et non à l’extérieur. Le principe « d’autant plus de réduction, d’autant plus de donation » qui est en fait inspiré au principe d’Husserl « Sowiel Schein, sowiel Sein » qui remonte d’ailleurs avant Husserl à Herbart, veut dire que de la même manière que pour Husserl seul la réduction permet d’atteindre à une donnée, à l’occurrence intuitif, absolument incontestable et que c’est la réduction qui, loin de limiter, stabilise, assure l’intuition, de la même manière la réduction, si elle généralisable à l’ensemble du donné produit la certitude et pas seulement la certitude de l’intuition mais de tout ce qui est donné quel qu’il soit au sens de l’extension de la donation qu’Husserl atteint du texte du 1906, l’Idée de la phénoménologie, sous tout les formes de la donation qui comprennent, je rappelle, non seulement l’impression originaire, le flux de conscience, l’objet et ses variations dans le flux de conscience mais ultimement les idéalités mathématiques, les idéalités logiques et y compris le contresens, la contradiction et toutes les formes du néant. Donc « d’autant plus de réduction, d’autant plus de donation » substitue la donation à l’intuition et réintègre le principe dans la réduction. C’est ça qui fait la rupture avec le principe de tous les principes.

3) Il subsiste une correspondance profonde − à mon avis − entre les analyses que Vous développez en Dieu sans l’être du livre de Qohelet et du concept de Vanitas d’un coté et le § 4 du Phénomène érotique. Il me semble pouvoir clairement instituer une opposition entre la couple « concept métaphysico-égologique du monde/vanitas » et « donation/caritas » de l’autre. On ne risque pas, par cette opposition, de retomber dans l’alternative (encore transcendantale) du Dasein entre Eigentlichkeit et Uneigentlichkeit ? Qu’est-ce que donne de nouveau le concept de « phénomène saturé » et sa découverte à cette alternative ?

Marion -  Il y a plusieurs questions dans Votre question, mais je vais me concentrer sur une chose très intéressante qui Vous avez posez du rapprochement possible entre « concept metaphysico-égologique du monde/vanitas » et  « donation/caritas » d’un coté et Eigentlichkeit et Uneigentlichkeit  de l’autre. Evidemment ! Elle peut et doive et marque et ça marque d’autant plus la différence. C’est-à-dire que, pour Heidegger, plus le Dasein s’approprie lui-même, plus il devient son eigentum, donc Eigentlich, plus la situation ontologico-phénoménologique est correcte. Donc l’altération de l’Uneigentlich devient l’altération et l’aliénation du Dasein, qu’il fait partie de l’altération du Dasein comme telle. L’expropriation s’oppose à son appropriation. Dans la problématique de la vanité par exemple − c’est exacte qu’est la même vanité mise en question depuis Dieu sans l’Etre jusqu’à « Le phénomène érotique » − c’est exactement l’envers, la vanité pour l’ego c’est la situation dans laquelle le Dasein veut s’approprier à lui-même et c’est là qu’il succombe à la vanité, parce que s’approprier à soi même, Heidegger d’ailleurs ne dirait pas le contraire, c’est pour le Dasein s’approprier de son être, entrer en possession de son être comme pouvoir être etc.. Par conséquent c’est à ce moment là que le Dasein, d’une certaine manière, est soumis au nihilisme car aussi approprié soit-il à son être et réciproquement, il ne peut pas éviter la question « à quoi bon ? ». La question  « umsonst ? » porte sur l’être lui-même et ne peut porter finalement sur l’être lui-même. « Que vaut d’être ? ». La question de Nietzsche s’applique au Dasein lui-même. N’est pas par hasard que, pour Heidegger, le travail avec Nietzsche est commencé après Sein und Zeit. Sein und Zeit est encore, à mon avis, exposé au nihilisme. Donc plus le Dasein est approprié à lui-même, plus le Je, le sujet, l’ego est approprié à lui-même plus il est affaibli face au nihilisme. Au contraire la question de la charité, de la donation s’il l’on veut, mais je préférais le problème de l’assurance. L’assurance c’est la claire démonstration du fait que la certitude n’est pas donnée à l’ego par l’ego mais que lui doit être donnée par une autre que lui, par un autre identifié ou non, par un autre ayant statut d’ego ou non, peu importe. Disons simplement que l’assurance vient toujours d’ailleurs. Paradoxalement l’assurance reproduit l’Uneigentlich et l’Uneigentlichkeit, dans l’assurance je suis rendu à moi-même parce que je suis donné à moi-même par ailleurs. Donc l’inappropriation − dans la mauvaise traduction française l’inauthenticité − devient ici ce qu’il s’agit d’atteindre et non pas ce à qu’il faut s’arracher. Cette problématique − si je puis dire − de l’ailleurs, est de toute façon assez une question mise déjà en lumière par Levinas où, au but du compte je signifie le voici et le voici signifie l’élection, signifie que je soi moi-même à partir d’ailleurs, par, grâce, par la grâce d’un ailleurs. Ce qui signifie d’ailleurs « me voici » parce que « me voici » c’est non pas le « je suis ici » mais c’est la transcription du « je suis ici » du point de vue d’ailleurs. C’est ce que nous disions à propos du cas de l’anamorphose : je ne suis pas ici, je suis là où d’ailleurs on me voit ». Il faut donc dépasser − Vous avez parfaitement raison de formuler la question ainsi − l’horizon de la phénoménalité, car il n’est pas ouvert par le Je. Ceci semble contredire l’ensemble de la phénoménologie réelle. En fait tel n’est pas le cas. On peut dire qui la phénoménalité est ouverte du point de vue husserlien non pas par le Je mais par l’impression originaire. Le Je résulte de l’Ur-impression, elle est irréductible donc antérieure. Il y donc une facticité du Je et même du monde et Heidegger le formalisera en parlant de la Geworfenheit, c’est-à-dire que le Dasein en un sens n’est pas originaire. Dans le langage d’Heidegger c’est l’ouverture de l’être qui rend possible ultimement le Dasein et pas l’inverse. Ce détournement est difficile à conquérir mais c’est l’enjeu de la deuxième partie de Sein und Zeit et surtout de la Kehre. Il me semble que le mouvement de la phénoménologie est gouverné par la tension entre la primauté épistémique du Je et la primauté qui échappe au Je et lui impose la facticité ; primauté qui peut être pensée, déclinée en différentes directions. Ca peut être Autrui, ça peut être l’impression originaire, ça peut être la chair, ça peut être l’appel de l’être. En ce sens lorsque je parle d’une secondarité du je par rapport à la donation je reste dans cette ligne, simplement la donation d’une certaine manière universalise la secondarité de l’ego, au lieu de la focaliser simplement sur un terme particulier. Par exemple il y a de développements très intéressants actuellement sur ce qu’on appelle la « phénoménologie de la naissance », par opposition à l’être pour la mort. Mais il faudrait comprendre comment il s’agit pas de la naissance empirique, la naissance comme fait empirique ou aussi de la naissance comme fait empirique mais il s’agit de la question de la Geworfenheit, la question de la naissance n’est pas la question du commencement, c’est la question de la Geworfenheit dans toute sa radicalité. Donc en ce sens la question de la donation, la question du fait que je suis toujours en revenant de la donation, ce que j’appelle l’adonné, et dire que non seulement je reçois ce que je reçois comme donné mais je me reçois moi-même en recevant le donné. Je suis aussi donné que ce que je reçois comme donné. Donc l’adonne est un nom qui tend à nommer, qui tend à penser, la facticité ou plus exactement la Geworfenheit absolument constitutive, pour ainsi dire transcendantale à rebours, de la phénoménalité. L’adonné essaie de penser le fait que le seul  « a priori » se trouve dans le caractère définitivement a posteriori de toute phénoménalité pour moi.

3) Au § 16 de « Le phénomène érotique » en synthétisant thèmes fondamentaux de Dieu sans l’etre et Etant donné, vous affirmez : « l’Amour se diffuse à perte ou bien il se perd comme amour ». Ou encore : « L’Amour est sans etre ». En quel sens cette « assurance » inconditionnée et imprévisible, comme assurance qui vient d’ailleurs, nous permet d’accéder à une conscience d’ouverture au monde qui ne soit pas vanitas ?

Marion - Il y a bien entendu des nombreuses façons de répondre à cette question, ou plutôt simplement de l’expliciter. Le problème essentiel se trouve dans ce que d’ailleurs je ne crois pas d’avoir d’ailleurs encore développé jusqu’ici, la considération que par exemple le don, le don au sens érotique du don et plus généralement de don dans toutes ses figures, le don est un phénomène ou un ensemble des phénomènes qu’on  ne peut pas être pensé dans la réduction à l’échange etc., qui ne peut se décrire que par la suspension de l’application des deux principes de la métaphysique. Il y don, donc, s’il y a contradiction du principe de non-contradiction, c'est-à-dire que le même cesse d’être le même : le véritable don, dans sa non-réciprocité, dans le fait qu’il y a l’arrêt du retour du don, suppose que part définitivement à l’autre, et donc en ce sens se contredise et abandonne son essence. Mais le don contredise aussi le principe de raison suffisante : on peut toujours donner au but du compte, on ne peut donner comme tel que sans raison et pour rien. La rationalité − car c’est une rationalité − du don ne peut pas s’inscrire dans le champ de la rationalité métaphysique, la rationalité que la métaphysique à définie. Le don est donc sans fondement, le don est sans raison et sans crainte de la contradiction. Et il ne peut être qu’ainsi. Pourquoi d’ailleurs il est douteux qu’on puisse le définir en disant qu’il est car le don plus il se perte plus il est d’une certaine façon, cette est une structure qui lui est essentielle. Dans la situation érotique l’avance est ce que le confirme absolument. D’ailleurs la mise en œuvre du processus érotique commence de la parole qui dit « je t’aime » : c’est une parole qu’est ni vraie ni fausse. Ca n’a pas de sens si cela est vrai ou faux car ça ne décrit aucun état de chose, car ça ne prédit aucun état de chose. On ne peut pas dire « je t’aime » sincèrement, sans être amoureux, ça veut dire qu’on n’aime pas. Cet énoncé « je t’aime » qui est dit en un sens sans raison et qu’implique que je ne reste pas identique à moi-même. Ce « je t’aime » initie la logique érotique précisément parce que c’est la réponse de l’autre qui va le confirmer. Et si l’autre ne croit pas, ne fusse qu’en manière infime, que de fait je l’aime, la situation érotique est mise en doute et du même coup, même silencieuse, va devenir pour moi une raison, la première raison véritable de continuer à dire « je t’aime ». A ce moment là on rentre dans une logique, qu’est celle de l’avance selon laquelle plus je parle, plus j’agit à perte, plus cette perte se renforce elle-même. Et ça c’est l’avance. L’avance doit s’entendre, non seulement en français, le fait d’être devant : se donner à perte, peut être dans l’espoir du retour mais sans aucune garantie.

4) Est-ce que ce « se perdre de l’amour et par là se renforcer comme amour » ne relève pas de la symbolique chrétienne et proto-chrétienne − analysée magistralement par Jean Danielou (Les symboles chrétiens primitifs) − de Dieu  (et de l’amour de Dieu) comme source de vie, d’où iconographie de l’Ichsos ?

Marion - Oui évidemment le rapproche avec des thématiques de théologie et de théologie chrétienne est évident mais au niveau où j’essaie de développer il n’est pas nécessaire d’emporter un modèle chrétien pour arriver à cette description. Il renforce d’ailleurs d’autant plus la pertinence des énoncés de la théologie chrétienne mais en fait nous avons besoin de cette logique quelle qu’en soit l’origine, pour décrire un certain nombre de phénomènes. Si on ne prend cette logique de la donation au sérieux, on voit qu’il y a tout simplement des phénomènes qui n’apparaissent pas. Le don, la question de la paternité, de la naissance, le phénomène érotique, tous ces phénomènes tout simplement n’apparaîtront  pas, seront à considérer comme des noms, des interprétations arbitraires d’autres phénomènes. Le don, par exemple, ne sera plus qu’une illusion que dans sa vérité relève de la logique économique de l’échange dont il ne serait qu’un cas particulier. On prendra, par exemple, la paternité comme reproduction, ce qu’on fait à ce moment. Or, par contre la paternité est tout autre que la reproduction, tout sauf que reproduction,  la paternité n’est jamais un production à l’identique, une différenciation réglée ou déréglée. Le phénomène de l’avance va être ramenée une figure du désir mais il n’est pas fondé sur le désir, le désir est toujours intentionnel, est toujours à partir de moi. La relation érotique n’est jamais à partir de moi. Donc il y a un certain nombre des phénomènes qui ne sont pas intelligibles si on n’accepte pas cette logique. La raison pour laquelle on ne l’accepte pas c’est que certains croient que cette logique le compromette directement avec la théologie chrétienne, d’ailleurs il est possible mais il faut chercher la vérité là où elle est et il faut abandonner les préjugés idéologiques. 

5) Dans la méditation « De la chair qu’elle s’excite » Vous soutenez que « la chair d’autrui se phénoménalise sans se laisser voir », en réalisant  pour ainsi dire l’anamorphose pure. Par là − avec l’opposition entre la chair au singulier et les corps au pluriel, il y a un gain effectif d’un monde au delà de la vanité. En quel sens peut-on penser la substitution de la chair d’autrui comme individuation ultime au visage d’Autrui levinasien dans sa pure « non-individuation » ?

Marion - Chez Levinas il y a une difficulté, qui est précisément, en tant que difficulté, éclairante. C’est le fait que voir le visage d’Autrui, au sens strict, cela ne se peut pas, parce que lorsque je regarde Autrui je vois toujours un corps. Ce n’est que par analogie − chez Husserl −  que je pense qu’il y a une chair d’autrui. Alors dans le cas de Levinas je vois le visage d’Autrui à la lumière de l’exigence éthique qu’il m’impose. Il y a donc un renversement de l’intentionnalité est c’est dans le poids dont pèse sur moi la revendication  éthique d’autrui que d’une certaine manière son visage m’apparaît. Son visage, sans apparaître, pèse sur moi, me prouve. Or cette invisibilité elle est d’une certaine manière que se met en œuvre radicalement dans l’érotisation de la chair parce que l’écart qu’il y a entre le corps et la chair, dans mon cas, se redouble si ma chair devient chair érotisée. Se redouble précisément parce que ma chair ne peut pas s’érotiser que par la chair d’un autre, en principe. C’est donc l’autre qui rend possible l’érotisation de la chair, pas moi-même : il faut toujours une altérité pour quoi une érotisation soit possible, pour quoi l’érotisation fonctionne. Il s’en suit que l’écart entre ma chair et ma chair érotisée moi seul le prouve et je ne le prouve qu’en ne le voyant pas. Et d’une certain façon autrui qui provoque cette érotisation ne la voit pas non plus. Autrui ne voit mon érotisation que parce que je provoque la sienne. Il y a donc, en ce sens, des phénomènes invisibles. Il n’y a aucune contradiction dans les phénomènes invisibles et, en ce sens, l’érotisation de la chaire est invisible. Donc se montre par là l’impossibilité de visualiser ce phénomène, car précisément l’érotisme ne se visualise pas, comme faire de la publicité d’un bon vin et essayer de faire sentir qu’il est bon : on ne peut pas voir le goût du vin. Et bien l’érotisation de la chaire ne se voit pas et cette contradiction, qui est celle de la pornographie, est sans fin. C’est parce que la pornographie produit toujours une frustration énorme parce que précisément le phénomène érotique reste invisible. C’est cette invisibilité en tant invisibilité que nous semble déterminant.  Phénomènes invisibles la phénoménologie contemporaine a censé de cerner de discerner, la chair est invisible, le visage d’autrui est invisible, si j’étais généreux  je dirais que même Sartre quand il parle du group en fusion, par exemple, veut décrire un phénomène invisible. Bien entendu la question théologique de l’invisibilité de Dieu dans la Révélation est un cas exceptionnel mais phénoménologiquement c’est quelque chose qui ne sort pas de la problématique de la phénoménologie : y est directement appliqué. L’invisibilité des phénomènes commence à bien voir avec la question de la visibilité ou invisibilité de Dieu, il nous est infiniment familière et donc il y a des nombreuses difficultés entre la philosophie et la théologie mais la question de la visibilité de l’invisible fait pas partie des difficulté, en fait.

6) Il y a, dans la couple « me voici-je viens » une dialectique eschatologique (ou crypto eschatologique) du déjà-pas encore ? En quel sens, s’il y a, cette dialectique paradoxale préfigure et reprend un des points centraux de Etant donné et de « Le phénomène érotique », Dieu? Comment peut-on penser ce concept ?

Marion -  Je ne mettrais pas directement en relation « me voici » et « je viens » parce que ce sont deux extrémités du parcours érotique. Le parcours érotique commence du moins de l’étape « m’aime t’on ? ». Le « m’aime t’on ? » dans sa logique ultime qu’est à la fois érotique et logique eschatologique, aboutit à dire « je viens ». Mais entre les deux il y à des nombreuses figures : alors le « je viens » en ce sens est profondément opposé à une téléologie historique, parce que la téléologie historique, en quelque sens pour l’entendre, est toujours fondée sur une égologie, une égologie éventuellement de la décision absolue (Sein und Zeit) ou de la conscience absolue. Ici le « je viens », d’une certaine manière, ne vient pas de moi, érotiquement et éschatologiquement du « je viens » c’est pas moi qui décide. Il n’y a pas, donc, de dialectique de déjà-pas encore, ou alors il faut dire que si la phénoménalité dépend d’une impression originaire, d’une facticité, d’une Geworfenheit originaire, à propos d’une naissance du début on est dans la situation du déjà-pas encore. Déjà pas encore sont en fait synonymes : dire le phénomène déjà se donne avant que je le constitue ou dire le phénomène s’est pas encore totalement donné bien que je l’essaie de le constituer, ce sont deux façons pour exprimer la même chose, à savoir le retard, l’a posteriori seul originaire de la phénoménalité par rapport à celui  qui la voit. Donc ce sont deux façons de dire le même retard et cet retard qu’est ni historique, car « préhistorique », donc qui n’est pas dialectique non plus, car il n’est pas question de négation, il n’y a pas de négation, il n’y a pas du travail du négatif, il y a un retard  de la réception sur le donné : il s’agit du moment de l’excès. Il s’agisse d’un moment négatif il s’agisse du moment de l’excès, car c’est l’excès qui fait le retard.

7) Le gain philosophique de plusieurs des Vos travaux, synthétisé grossièrement, semble être le concept d’une ipséité non comme auto-affection mais comme hétero-donation (le serment, la chair érotisé, la déclaration). Si la raison est le sujet qui met en œuvre l’interrogation philosophique, comment peut-on encore penser, au sens d’une hétero-donation une nouvelle (troisième) philosophie première ?

Marion  -  Voilà la difficulté de la proth filosofia c’est que la philosophie, au sens moderne du terme ne peut pas renoncer à être philosophie première, car il est là qu’elle se sait comme philosophie. Mais par ailleurs la philosophie est arrivée à ce point qu’elle ne peut que critiquer toute prétention à la primauté. L’inaccessibilité de l’origine devenant si je puis dire le point en commun de toutes les philosophies contemporaines. Alors comment peut-on, comment un philosophe peut-il gérer ce paradoxe, cette contradiction plus exactement. En un sens il n’y a qu’une voie, à savoir que l’originaire, ce qui nous reste comme originaire c’est le caractère non originaire de notre propre pensée. Ce qu’est originaire c’est le retard, si non la différance pour hommage à Derrida si l’on veut. Mais comment penser ce retard ? Justement Derrida décrit la différance mais il la décrit purement négativement, il y a un retard de l’intuition, il y a un retard de la présence, qu’on peut vérifier de mille et une manière. La question quel est ce retard, quel est son statut, d’où nous gène-t-il, pourquoi il n’y a pas d’origine, il y a-t-il d’autres explications que mythologique, il y a-t-il d’autres manières de le comprendre que mythologiques ? D’une certaine manière Derrida est le penseur qui rétablît de la mythologie, du mythe. Alors la problématique de la donation permet si non de concevoir au moins de poser plus clairement le motif du retard, du retard à l’origine. C’est que l’originaire nous arrive sous la forme d’un don et de la définition du don, de la réception du don, de la condition de possibilité du don, est toujours inférieur au don. L’originaire fondamentale, l’écart fondamental c’est le retard entre le don et la réception du don, cet écart nous pouvons, sous des dons détermines, parfaitement le voir. Tout don, comme toute réception du don,  est un retard sur sa donation, sur la donation du don. Il y a un cas tout à fait indiscutable qu’est justement le caractère de la filiation, le rapport au père qui est fondé sur le retard. C’est un retard qui nous connaissons tous, dans lequel toute notre histoire se déploie, personne n’y a jamais échappée, c’est par cela qui nous avons tous une histoire individuelle : c’est le retard sur le don, le don est incompréhensible, non identifiable et nous passons toute notre temps − au sens strict du terme − à tenter d’identifier le don. Ce retard à l’origine qui fait tous les destins individuels est la figure même à la fois de l’origine et de l’absence de l’origine. Le fait que l’origine soit l’absence de l’origine devient intelligible dans la problématique du don, il ne devient pas intelligible par la problématique même de l’histoire, car si l’histoire est pensée en dehors du don, elle va toujours être pensée sous le mode, on va dire, de la création, et toute le monde pense  sous le mode de la causalité efficiente. Et donc, si on n’admet pas que la phénoménalité s’ouvre par la causalité efficiente, la seule autre voie c’est de nier que le monde c’est l’effet d’une cause efficient et dans ce cas là il n’y d’autre solution de tenter de prouver que le monde est causa sui. C'est-à-dire une forme de la réappropriation de l’origine. Mais la réappropriation de l’origine dans l’originé est un phantasme, et c’est un phantasme qui est le renversement d’une interprétation absolument fausse de l’origine comme un effet de la causalité efficiente.

 

Fenomenologia della donazione
Intervista a Jean-Luc Marion

Jean-Luc Marion è uno dei più importanti filosofi contemporanei. Nato nel 1946, allievo dell’Ecole Normale Superieure (1967-1971), è stato tra i fondatori dell’edizione francese della rivista “Communio”. Insegna all’Università “La Sorbona” di Parigi e all’Università di Chicago. Rappresenta, già da molti anni, un esponente di spicco della tradizione filosofica francese del Novecento − che annovera, tra gli altri, pensatori come Ricoeur, Levinas, Derrida, Henry etc.−  con in quali ha spesso dialogato. Storico della filosofia e teoreta di primo piano − per Marion la specularità tra attività storico-filosofica e filosofia “in prima persona” si è sempre dimostrata inscindibile −  consacra la sua opera ad una tensione estrema, potremmo dire ad una estenuazione (fino all’inversione) del concetto fenomenologico fondamentale dell’intenzionalità come attività distintiva di un polo egologico (e metafisico). In questo senso, portando all’estenuazione l’intenzionalità, apre la strada all’anamorfosi,  a ciò che, come vedremo nell’intervista, possono essere definiti i fenomeni invisibili. Nella coscienza dell’ossimoro, della contraddizione che l’affermazione di un fenomeno invisibile rappresenta per un polo egologico che si pretende costituente, Jean-Luc Marion orienta le sue interrogazioni e le sue analisi in un orizzonte che è quello dischiuso dalla crisi della metafisica onto-teo-logica. Solo in quest’orizzonte, per Marion,  possono essere recuperati quei temi teologici della tradizione biblica e cristiana che, in regime di opposizione tra fides e intellectus, erano (e non potevano che essere) banditi dalla filosofia moderna dell’ego. A ciò gli è valsa la critica, formulata da Dominique Janicaud, di porre in atto un “tournant théologique de la phénoménologie”, una “svolta teologica della fenomenologia”....ma, si sa, al di là degli slogans la “cosa filosofica” si dimostra molto (infinitamente) più complessa.  Alla nascita dell’egologia metafisica é dedicata la notissima trilogia su Descartes. In questa direzione si muovono anche i tre testi  Reduction e donation e Etant donné e De surcroît, in cui Marion analizza e propone una via di superamento dell’egologia già indicata dalla fenomenologia husserliana e dal pensiero heideggeriano. In questa stessa direzione si muove la scoperta e la definizione del “fenomeno erotico”, una profondissima riflessione su temi centrali della soggettività e sulla sua possibilità di apertura all’esperienza, possibilità rinvenuta, appunto, nel “fenomeno erotico”. Le sei meditazioni de “Le phénomène érotique” sono modellate sapientemente sullo schema comune delle Meditationes de prima philosophia di Descartes e delle Cartesianischen Meditationen di Husserl − come a rappresentare un nuovo inizio dopo l’evoluzione (involuzione) dell’egologia da Descartes alla crisi della fenomenologia trascendentale. Al di là un’interpretazione naïve, molto spesso offerta, le sei meditazioni rappresentano un’interrogazione profonda sui temi dell’apertura del soggetto al mondo (o, meglio, del mondo al soggetto), sull’intersoggettività, sul superamento del carattere transeunte della dimensione mondana (la vanitas), su quel Dio che − in anticipo sull’Enciclica “Deus caritas est” − “ci precede sempre come miglior amante”. Legato a temi centrali del suo cammino speculativo precedente − “Dieu sans l’Etre”, “Prolégomènes à la charité”, “La croisée du visible”, “L’idole et la distance” − « Le phénomène érotique » rappresententa anche un « nuovo inizio » del pensiero di Jean-Luc Marion, come dimostrano le sue opere successive e quelle in progetto. L’ammissibilità o l’inammissibilità di quest’inversione dell’intenzionalità, di questa inversione della dinamica secondo cui é il mondo che si apre al soggetto e non viceversa, l’accettazione dei temi, delle questioni e delle soluzioni che la Sua opera delinea, é, come sempre, sottoposta alla domanda filosofica. Noi lo ringraziamo per la simpatia e la disponibilità che lo contraddistingue sempre.

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1) Professor Marion, ne « La croisée du visible et de l’invisible ». Lei sottolinea come nell’arte prospettivistica del Rinascimento viene mantenuta ancora una specularità tre la prospettiva e l’anamorfosi, specularità che riesce ancora a realizzare un incontro, un incrocio tra il visibile e l’invisibile. Ora, la costituzione della soggettività moderna − dipendente anche dalla costituzione della geometria e fondata sul paradigma di una fenomenalità povera − perde il carattere di anamorfosi della fenomenalità. Come può la fenomenologia del dono recuperare e cogliere questa “anamorfosi”?

Marion - Il problema dell’anamorfosi si trova naturalmente all’interno del problema dell’intenzionalità. Nei dibattiti contemporanei sull’intenzionalità ci sono due questioni che si pongono: da un lato più abitualmente quella della naturalizzazione o meno dell’intenzionalità ma questo dibattito resta all’interno del carattere semplificante della conoscenza e, quindi, i dibattiti sulla naturalizzazion dell’intenzionalità si mostrano secondari. Ciò che al contrario é più importante é una questione che viene essenzialmente posta, a mia conoscenza, da Emmanuel Levinas e Michel Henry, e si potrebbe anche risalire a Heidegger, la questione di come si può arrivare all’inversione dell’intenzionalità, cioè di disporre di un’intenzionalità qui dalla cosa si riversi su di noi. Il fatto é che questa possibile inversione é introdotta dal rapporto all’altro, come sostiene Levinas, e in certo modo nel rapporto a me stesso come “corpo vivo”, come “carne” e, in Michel Herny, come “autoaffezione”. Ciò che era rimasto intentato e impensato, a mio avviso, era che sia veramente il rapporto alla cosa que inverte l’intenzionalità, la cosa che io non sono e non solo “l’altro”. Ciò che ho tentato di porre in atto con l’anamorfosi. L’anamorfosi consiste nell’affermare che certi fenomeni non possono essere visti che modificando, imponendo al soggetto di modificare, il suo proprio punto di vista, la sua propria posizione in relazione alla cosa stessa secondo il modello dell’anamorfosi nel quadro, nel quale bisogna porsi in una certa posizione per veder “apparire il fenomeno”. E’ lo stesso per certi fenomeni. Questa domanda é direttamente connessa − ben inteso − alla questione della fatticitià, alla questione dell’ In-der-Welt-Sein, tale che il fenomeno impone che io mi debba porre da un certo punto di vista. In caso contrario io ne ricevo le stesse informazioni ma non lo “vedo”. Questa é forse una problematica legata all’ermenautica a condizione di pensare l’ermeneutica non come una interpretazione della cosa da parte mia ma, in un certo senso e più essenzialmente,  un’interpretazione che la cosa mette in opera su di me.

2) Un altro paradigma della soggettività che la fenomenologia del dono (o della donazione) sostiene di superare o di aver separato é il concetto di orizzonte comme proveniente, proiettato da un Io trascendentale in virtu dei suoi atti intenzionali. Questo passa per l’abbandono de “principio di tutti i principi” messo in atto dal principio, che lei ha formulato, “tanto più di riduzione, tanto più di donazione”[ J.-L. Marion, Etant donné, § 1, pp. 23-29]. Ma si tratta qui − Le chiedo − di un abbandono, di una negazione o di un superamento nel senso dell’Aufhebung hegeliana?

Marion - La questione dei principi della fenomenologia è una questione antica, Husserl ne ha proposti almeno tre e Heidegger d’altronde a più o meno usato questi differenti principi. Ma é chiaro che il principio di tutti i principi di Husserl di Idee I, § 24 è suscettibile di una critica radicale dallo stesso punto di vista fenomenologico. Perché questo? Perché da un lato il principio assume senza mai criticarla l’equivalenza tra evidenza et la fenomenalità, la manifestatione, equivalenza che in un certo modo attenua l’ipotesi sia di una alhqeia sia di un rifiuto della verità nel senso agostiniano del termine.  In secondo luogo questo principio precede curiosamente la formulazione e la pratica della riduzione e quindi, in qualche maniera, si dà insieme come originale e anteriore alla riduzione della tesi naturale, rappresentando una grave contraddizione. In terzo luogo il principio di tutti i principi è interamente governato dalla nozione di evidenza e di riempimento e, quindi, dalla nozione d’intenzionalità e, di conseguenza, dalla nozione di soggettività trascendentale. Quindi il principio occlude la possibilità di una filosofia non transcendentale. Questa é la ragione per cui ho rischiato un doppio movimento che consiste da un lato nel sostituire all’evidenza, cioè in fin dei conti all’intuizione, la donazione, inglobando questa non solamente l’intuizione ma allo stesso titolo il significato o le essenze, quindi integrando nella manifestazione l’insieme delle determinazioni del fenomeno e non solamente l’intuizione. Riduzione, quindi, e in secondo luogo donazione, un principio che sia all’interno della riduzione e non all’esterno. Il principio “tanto più di riduzione, tanto più di donazione”, che é di fatto ispirato al principio husserliano “Sowiel Schein, sowiel Sein” il quale, a sua volta, risale à Herbart, significa: come, per Husserl, solo la riduzione permette di attingere un dato, all’occorenza intuitivo, assolutamente incontestabile, la riduzione che, lungi dal limitarla, assicura l’intuizione, nello stesso modo allora la riduzione, se questa è generalizzabile all’insieme del dato, produce la certezza e non solamente la certezza dell’intuizione ma di tutto quello che ci è dato quale che sia. Ciò va nella direzione dell’estensione della donazione  che Husserl attinge nel testo del 1906, L’idea della fenomenologia, sotto tutte le forme di donazione che comprendono, lo ricordo, non solamente l’impressione originaria, il flusso di coscienza, l’oggetto e le sue variazioni nel flusso di coscienza ma anche le idealità matematiche, le idealità logiche, ivi compresi il controsenso, la contraddizione e tutte le forme del nulla. Quindi “tanto più di riduzione, tanto più di donazione” sostituisce la donazione all’intuizione e reintegra il principio nella riduzione. E’ questo che marca la rottura col principio di tutti i principi.

3) Sussiste una corrispondenza profonda − a mio avviso − tra le analisi che lei sviluppa in Dieu sans l’etre sul libro dell’Ecclesiaste e sul concetto di vanitas da un lato e il § 4 de Le phénomène érotique dall’altro. Mi sembra si possa istituire chiaramente un’opposizione tra la coppia concettuale “concetto metafisico-egologico di mondo/vanitas” e “donazione/caritas”. Con questa oppositione non si rischia di ricadere nell’alternativa (ancora trascendentale), posta al Dasein, tra Eigentlichkeit e Uneigentlichkeit? In cosa il concetto di “fenomeno saturo” e la sua scoperta rinnovano questa alternativa?

Marion - Nella sua questione ci sono molte questioni e io mi concentrero su una cosa molto interessante che avete posto: la questione della prossimità possibile tra “concetto metafisico-egologico di mondo/vanitas” e “donazione/caritas” da un lato con Eigentlichkeit e Uneigentlickeit dall’altro. Evidentemente! Si può e si deve, ciononostante tutto questo evidenzia ancor più la differenza. Vale a dire che, per Heidegger, più il Dasein si appropria di sé stesso, più diviene il suo eigentum, quindi Eigentlich, più la situazione ontologico-fenomenologica é corretta. Quindi l’alterazione dell’ Uneigentlich diviene l’alterazione e l’alienazione del Dasein che fa parte dell’alterazione del Dasein come tale. L’espropriazione si oppone alla sua appropriazione. Nella problematica della vanità, per esempio − é essatto affermare che si tratta della stessa verità messa in question à partire da Dieu sans l’être fino à Le phénomène érotique − é esattamente l’inverso, la vanità per l’ego é la situazione nella quale il Dasein vuole appropriarsi à lui stesso ed é là propriamente che soccombe alla vanità. Questo accade in virtù del fatto che − Heidegger d’altronde non direbbe il contrario − l’appropriarsi à sé stesso é per il Dasein appropriarsi del suo essere, entrare in possesso del suo essere come “poter-essere” ecc.. Di conseguenza é a questo punto che il Dasein, in un certo modo,  é sottomesso al nichilismo, perché anche appropriatosi al suo essere e viceversa, non può in alcun caso evitare la questione “a che pro?”. La domanda “umsonst?” si dirige sull’essere stesso e non può che essere diretta in ultima istanza sull’essere stesso. “Che vale d’essere?”: la questione di Nietzsche si applica al Dasein stesso. Non é infatti casuale che, per Heidegger, il lavoro con Nietzsche inizi e sia iniziato dopo Sein und Zeit. A mio avviso Sein und Zeit é ancora esposto al nichilismo. Al contrario ne é della questione della carità, se si vuole della donazione, ma preferirei il problema dell’assicurazione. L’assicurazione é la chiara dimostrazione del fatto che la certezza non è data dall’ego all’ego (a sé stesso) ma che gli deve esser “data” (donata) da un altro che non sia lui, da un’altra identità o meno, da un altro avente statuto di ego o meno. Diciamo semplicemente che l’assicurazione viente sempre da un altrove. Paradossalmente l’assicurazione riproduce l’Uneigentlich e Uneigentlickeit, nell’assicurazione sono reso à me stesso perché sono dato (donato) à me stesso da un altrove. Quindi l’inappropriazione − inautenticità nella cattiva traduzione francese − diviene qui ciò a cui si deve aspirare e non ciò da cui ci si deve sottrarre. Questa problematica − se posso dire − dell’ altrove, é in ogni modo abbastanza una questione messa in luce da Levinas, in cui in fin dei conti, io rappresento l’eccomi e l’eccomi rappresenta l’elezione, rappresenta il fatto che io sono me stesso a partire d’altrove, per, grazie à, per la grazia di un altrove. Ciò che significa d’altrone “eccomi”, perché “eccomi” non é l’ “io sono” ma é la trascrizione dell’ “io sono qui” dal punto di vista di un “altrove”. E’ la stessa cosa che noi dicevamo a proposito del caso dell’anamorfosi: io non sono qui, io sono là dove altrove mi si vede. Bisogna dunque superare − lei ha perfettamente ragione di formulare la questione in questo modo − l’orizzonte della fenomenalità, perché l’orizzonte della fenomenalità non é aperto dall’io. Tutto ciò sembra contraddire l’insieme della fenomenologia reale. Ma, di fatto, non é così. Si può dire che la fenomenalità è aperta, dal punto di vista husserliano, non dall’io ma dall’impressione originaria. L’io risulta dall’Ur-impression: questa é irriducibile (non sottoponibile a riduzione), duque anteriore. C’è dunque una fatticità dell’io e allo stesso titolo del mondo e Heidegger lo formaizzerà parlando della Geworfenheit. Ciò equivale a dire che il Dasein, in un senso, non è originario. Nel linguaggio di Heidegger è l’apertura dell’essere che rende possibile, in ultima istanza, il Dasein e non il contrario. Questo rovesciamento è difficile a conquistare ma è la posta in gioco teorica della seconda parte di Sein und Zeit e della Kehre. Mi sembra che il movimento della fenomenologia sia governato dalla tensione tra la priorità epistemica dell’io e la priorità che sfugge all’io e che gli impone la fatticità. Questa priorità può essere pensata, declinata in differenti direzioni: può essere l’Altro, può essere l’Ur-impression, può essere la carne, può essere l’appello dell’essere. In questo senso quando parlo di una secondarietà dell’io in rapporto alla donazione resto su questa linea: semplicemente la donazione, in un certo modo, universalizza la secondarietà dell’ego piuttosto che focalizzarsi semplicemente su un termine particolare. Per esempio ci sono degli sviluppi molto interessanti, attualmente, su ciò che viene definita la “fenomenologia della nascita”, in opposizione all’essere per la morte. Tuttavia bisognerebbe comprendere che non si tratta propriamente della nascita empirica ma della questione della Geworfenheit, la questione della nascita non é la questione del cominciamento ma la questione della Geworfenheit in tutta la sua radicalità. In questo senso la questione della donazione, la questione del fatto che io sono sempre proveniente dalla donazione − ciò che io chiamo l’adonato − e del fatto che  che io non ricevo solamente ciò che ricevo come donato ma che mi ricevo io stesso ricevendo ciò che ricevo come donato. Quindi l’adonato è un nome che tende à nominare, tende a pensare, la fatticità o, più esattamente tende a pensare la Geworfenheit assolutamente costitutiva, per così dire trascendentale all’inverso, della fenomenalità. L’adonato cerca di pensare il fatto che il solo “a priori” si trova nel carattere definitivamente a posteriori di ogni fenomenalità per me.

4) Nel § 16 de « Le phénomène érotique », sintetizzando temi fondamentali di « Dieu sans l’Etre » e di « Etant donné », Lei sostiene che « l’Amore si diffonde a perdita o, meglio, si perde come amore ». O, ancora, “L’Amore è senza l’essere”. In che senso questa “assicurazione” incondizionata e imprevidibile, comme assicurazione che viene da altrove, ci permette di accedere a una coscienza di apertura al mondo che non sia vanitas?

Marion - Ci sono, ben inteso, molti modi di rispondere a questa domanda, o piuttosto semplicemente di esplicitarla. Il problema essenziale giace in ciò che credo di non aver ancora sviluppato fino a questo punto, la considerazione che, per sempio, il dono, il dono nel senso erotico del dono e più generalmente il dono in tutte le sue figure,  è un fenomeno (o un insieme di fenomeni) che non può essere pensato nella riduzione allo scambio ecc., che non  può descriversi se non attraverso la sospensione dell’applicazione dei due principi della metafisica. C’è dono, quindi, se c’è contraddizione del principio di non-contraddizione, cioè che “lo stesso” cessa di essere “lo stesso”: il vero dono, nella sua non-reciprocità, nel fatto che c’è una sospensione del ritorno del dono, suppone che il dono parta definitivamente all’altro, e quindi, in questo senso, si contraddice e abbandona la sua esenza. Ma il dono contraddice anche il principio di ragion sufficiente: si può sempre donatre “in fin dei conti”, non si può donare in quanto tale che senza ragione et per niente. La razionalità − perché é una razionalità − del dono non può inscriversi nel campo della razionalità metafisica, la razionalità che la metafisica ha codificato.
Il dono é dunque senza fondamento, il dono è senza ragione e senza contraddizione. E non può che essere così. Perché d’altronde é molto dubbio che lo si possa definire dicendo che é, perché, in un certo modo, più si perde più esso é, questa é una struttura che gli è essenziale. Nella situazione erotica l’avance rappresenta ciò che lo conferma assolutamente. D’altronde la messa in opera del processo erotico comincia dalla parola che dice “io ti amo”: questa è una parola che non è né vera né falsa. Tutto questo non ha alcun senso se è vero o falso perché non descrive alcuno stato di cose. Non si può dire “io ti amo” sinceramente senza essere innamorati: ciò equivarrebbe a dire che non si ama.  Questo enunciato “io ti amo” che viene detto, in un certo senso, senza ragione, implica che io non resti identico a me stesso. Questo “io ti amo” dà inizio alla logica erotica precisamente perché é la risposta dell’altro che viene a confermarlo. E se l’altro non ci crede, se non crede minimamente al fatto che io lo ami, la situazione erotica é messa in dubbio e allo stesso tempo, anche silenziosamente, diviene per me una ragione vera per continuare a dire “ti amo”. In questo momento si rientra in una logica che é quella dell’avance, secondo la quale più io parlo, più agisco in perdita, più questa si rinforza in sé stessa. E proprio questo é l’avance : donare-donarsi in perdita, forse nella speranza di un ritorno ma senz’alcuna garanzia.
 

5) Il « perdersi come amore e, in ciò rinforzarsi come amore » non trae forse origine dalla simbolica cristiana e proto-cristiana − analizzata magistralmente da Jean Danielou (I simboli cristiani primitivi) − di Dio (e dell’amore di Dio) comme fonte di vita, da cui l’iconografia del pesce, Ichsos, IHS?

Marion - Certo! Evidentemente il parallelismo con delle tematiche di teologia e di teologia cristiana è evidente ma al livello in cui io tento di sviluppare non è affatto necessario di importare un modello cristiano per arrivare a questa descrizione. D’altronde questo rinforza maggiormente la pertinenza della teologia cristiana ma di fatto noi abbiamo bisogno di questa “logica” quale ne sia l’origine, per descrivere un certo numero di fenomeni. Se non si prende sul serio questa logica della donazione, si vede che ci sono fenomeni che, semplicemente, non appaiono, non si manifestano. Il dono, la questione della paternità, della nascita, il fenomeno erotico, tutti questi fenomeni semplicemente non apparirebbero, sarebbero da considerarsi come dei nomi, delle interpretazioni arbitrairie di altri fenomeni. Il dono, per esempio, non sarà nulla di più che un’illusione che in fondo si rileva dalla logica economica della quale non sarebbe null’altro che un fenomeno particolare. Si prenderà, per esempio, la paternità come riproduzione, come si fa attualmente. Al contrario la paternità é tutt’altro che riproduzione, tutto salvo che riproduzione, la paternità non é mai una produzione all’identico, una differenziazione regolata sregolata che sia. Il fenomeno dell’avance, del « farsi avanti » sarà ricondotta à una figura del desiderio quando questa non è fondata sul desiderio, perché questo è sempre intenzionale, è sempre a partire da me. La relazione erotica non é mai a partire da me. Quindi c’è un certo numero di fenomeni che non sono intelligibili se non si accetta questa logica. La ragione per la quale non la si accetta è che alcuni credono che auesta logica li comprometta direttamente con la teologia cristiana. Cosa che d’altronde é possibile ma bisogna cercare la verità dove essa è, abbandonando i pegiudizi ideologici.

6) Nella meditazione quarta de “Le phénomène érotique”,  “De la chair qu’elle s’excite” [Della carne che si eccita], Lei sostiene che « la carne dell’altro si fenomenalizza senza lasciarsi vedere », realizzando in questo modo, per così dire, la pura anamorfosi. Con ciò − mediante l’opposizione tra carne al singolare [Leib] e corpi  [Körpern] al plurale − sussiste secondo Lei un guadagno effettivo del mondo al di là della vanitas.  In che senso si può pensare la sostituzione della carne dell’altro comme somma individuazione al volto dell’altro nella sua pura « non individuazione » ?

Marion - In Levinas sussiste una difficoltà, che precisamente, come difficoltà, è illuminante. Questa difficoltà sta nel fatto che il vedere il volto dell’altro, in senso stretto, è impossibile, perché io non vedo altro che un corpo e sempre un corpo. Non è che per analogie − in Husserl − che io penso ci sia, si dia una carne [Leib] altrui. Allora nel caso di Levinas io vedo il volto dell’altro alla luce dell’esigenza etica che esso mi impone. Sussiste dunque un capovolgimento dell’intenzionalità é questo sta nel peso con cui pesa su di me la rivendicazione etica dell’altro che questo volto mi appare. Il suo volto, senza apparire, pesa su di me, mi mette alla prova. Ora questa invisibilità é, in un certo senso, si mette in opera radicalmente nell’erotizzazione della carne in quanto lo scarto che sussiste tra il corpo e la carne, nel moi caso, si raddoppia se la mia carne diviene carne erotizzata. Si raddoppia, precisamente, perché la mia carne, ex principio, non può erotizzarsi che grazie alla carne di un altro. Dunque è solo l’altro che rende possibile l’erotizzazione della carne, non io stesso: c’è sempre bisogno di una alterità per la quale un’erotizzazione sia possibile, per la quale l’erotizzazione funzioni. Ne consegue che lo scarto tra la mia carne e la mia carne erotizzata io soltanto posso provarlo, e non lo provo altrimenti che non vedendolo affatto. Ci sono dunque, in questo senso, dei fenomeni invisibili. Non c’è alcuna contraddizione nei fenomeni invisibili e, in questo senso, l’erotizzazione della carne è invisibile. Con ciò si mostra l’impossibilità di visualizzare questo fenomeno, in quanto precisamente l’erotismo non si visualizza. Un pò come fare della pubblicità di un buon vino e tentare di far “sentire” che è buono: il gusto del vino non si può vedere. Ebbene l’erotizzazione della carne non si vede e questa contraddizione, che è quella della pornografia, è senza fine. Questo è il motivo per cui la pornografia produce sempre una frustrazione enorme, perché propriamente il fenomeno erotico resta invisibile. E’ questa invisibilità che ci sembra determinante. La fenomenologia contemporanea ha tentato di comprendre e distinguere dei fenomeni invisibili: la carne è invisibile, il volto dell’altro è invisibile, se volessi essere generoso potrei dire che anche Sartre − quando parla del “gruppo in fusione” − vuole descrivere un fenomeno invisibile. La questione teologica dell’invisibilità di Dio nella Rivelazione è − ben inteso − un caso eccezionale di questa invisibilità fenomenale ma è lo stesso qualcosa che non esula dalla problematica della fenomenologia: vi è direttamente applicata. L’invisibilità dei fenomeni esordisce, a ben vedere, con la questione della visibilità o invisibilità di Dio, ci è infinitamente familiare e, quindi, sussistono numerose difficoltà tra la filosofia e la teologia ma la questione della visibilità dell’invisibile non appartiene, di fatto, a queste difficoltà.

 

 7) Sussiste, nella relazione «  eccomi/ io vengo », una dialettica escatologica (o cripto-escatologica) di « già-non ancora » ? In che senso, se sussiste, questa dialettica paradossale prefigura e riprende uno dei punti centrali di Etant donné et de « Le phénomène érotique », Dio? Come si può pensare questa relazione?

Marion - Non metterei dierttamente in relazione l’ « eccomi » e l’ « io vengo  », perhé sono due estremità del percorso erotico. Il percorso erotico comincia almeno dallo stadio « io sono amato? » [più letteralmente “mi si ama?”, « m’aime-t’on ? »]. Il momento dell’ « io sono amato? » nella sua logica suprema che è allo stesso tempo una logica erotica e escatologica, approda al dire « io vengo ». Tuttavia tra i due ci sono numerose figure : allora l’ « io vengo », in questo senso, è profondamente opposto a una teleologia storica, perché la teleologia storica, per intenderla in un qualche modo, è sempre fondata su un’egologia, un’egologia − eventualmente − quale quella della decisione assoluta (come in Sein und Zeit) o della coscienza assoluta. Qui l’ « io vengo », in un certo modo, non proviene da me, eroticamente ed escatologicamente non sono io che decido dell’ «  io vengo » (di altrui). Non c’è dunque une dialettica già-non ancora, o altrimenti bisognerebbe dire che se la fenomenalità proviene da una impressione originaria, da una fatticità, da una Geworfenheit originaria, a proposito di una nascita dall’inizio si è in una situazione di già-non acnora. Già – non ancora sono di fatto sinonimi: dire il fenomeno già si dà prima che io lo costituisca o dire il fenomeno non è ancora totalmente dato anche se io tento di costituirlo, sono due modi per esprimere la stessa cosa, cioè il ritardo, il solo e originario «  a posteriori »  della fenomenalità in relazione a colui che la vede. Dunque sono due modi di dire lo stesso ritardo. Questo ritardo non é né storico − in quanto pre-storico − ne dialettico, perché non è una questione di negazione: non c’è negazione, non c’è lavoro del nagativo, c’è un ritardo della percezione sul dato: si tratta del momento dell’eccesso. Qualora ne vada qui di un momento negativo, si tratterebbe di un momento di eccesso, perché è l’eccesso che fa il ritardo.

8) Il guadagno filosofico dei vostri lavori, sintetizzato in modo maldestro, sembra essere il concetto di un’ipseità non come auto-affezione ma come etero-donazione (il giuramento, la carne erotizzata, la dichiarazione). Se la ragione è il soggetto che mette in opera l’interrogazione filosofica, come si può ancora pensare, nel senso dell’etero-donazione una nuova (terza) filosofia prima?

Marion - Ecco la difficoltà della proth filosofia: é che la filosofia, nell’accezione moderna del termine, non può rinunciare a essere filosofia prima, perché è la che essa si sa come filosofia. Tuttavia la filosofia è arrivata al punto in cui non può che criticare ogni sorta di pretesa alla primalità. L’inaccessibilità dell’origine diviene, se posso dire, il punto in comune di ogni filosofia contemporanea. Come si può gestire, allora, questo paradosso, più esattamente questa contraddizione ?  In un senso non c’è che una vie, cioè che l’originario, ciò che ci resta come originario, è il carattere non originario del nostro proprio pensiero. Ciò che è originario è il ritardo, se non la «  différance », in omaggio a Derrida? Ma come si può arrivare a pensare questo ritardo? Giustamente Derrida descrive la differance ma la descrive in senso puramente negativo, c’è un ritardo dell’intuizione, c’è un ritardo della presenza, che si può verificare in mille modi. La questione è: cosa è questo ritardo? Qual’è il suo statuto? A partire da cosa esso ci inquieta ? Perché non c’è origine? Ci sono a iguardo che delle spiegazioni non mitologiche? Ci sono delle altre maniere di comprenderlo che non siano mitologiche? In qualche modo Derrida è il pensatore che ristabilisce una certa mitologia, une certo mito. Allora, a questo punto, la problematica della donazione permette, se non di concepire, almeno di porre più chiaramente il motivo del ritardo, del ritardo all’origine. Il fatto è che l’originario ci arriva sotto la forma di un dono e la definizione del dono, la definizione della ricezione del dono, la definizione della condizione di possibilità del dono, saranno sempre inferiori al dono stesso. L’originario fondamentale, lo scarto fondamentale è il ritardo tra dono e ricezione del dono : questo scarto noi possiamo coglierlo nei casi di doni determinati. C’è un caso del tutto indiscutibile che è proprio il carattere della filiazione, il rapporto al padre che è fondato sul ritardo. E’ un retardo che noi tutti conosciamo, nel quale si sviluppa tutta la nostra storia, al quale nessuno può sfuggire ed è mai sfuggito, è attraverso esso che noi tutti abbiamo una storia individuale: è il ritardo sul dono, il dono è incomprensibile, non identificabile e noi passiamo tutto il nostro tempo − nel senso stretto del termine − a cercare di identificare il dono. Questo ritardo (rispetto) all’origine che determina tutti i destini individuali è la figura stessa dell’origine e dell’assenza di origine. Il fatto che l’origine sia l’assenza stessa dell’origine diviene intelligibile nella problematica del dono, non diviene intelligibile attraverso la problématica stessa della storia. Se infatti la storia è pensata al di fuori del dono, sarà sempre pensata sotto il modo, diremmo, della creazione, e ognuno pensa sotto il modo della causa efficiente. Quindi se non si ammette che la fenomenalità si apra in virtu della causalità efficiente, la sola altra via è di negare che il mondo sia l’effetto di una causa efficiente e, in questo caso, non c’è altra soluzione di provare che il mondo è causa sui. Vale a dire: una forma di riappropriazione dell’origine. Ma la riappropriazione dell’origine in ciò che ha avuto origine è un fantasma, un’illusione, un fantasma e un illusione che rappresenta il rovesciamento di una interpretazione assolutamente falsa dell’origine come causa efficiente, interpretazione che culmina nel dibattito − strictu sensu totalmente insensato − sull’origine del modo, sul Big Bang, che non ha alcun senso, in quanto presuppone 1) che la questione dell’origine sia oggettivabile 2) che il cominciamento sia l’origine 3) che il cominciamento potrebbe essere l’effetto di una causa efficiente.

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Bibliografia essenziale:

 

− Sur l’ontologie grise de Descartes. Science cartésienne et savoir aristotélicien dans les Regulae, Librairie Philosophique J.Vrin, Paris, 1975.

− Index des Regulae ad Directionem Ingenii de René Descartes, en collaboration avec J.-R. Armogathe, Ed. dell’Ateneo, Rome, 1976.
− René Descartes. Règles utiles et claires pour la direction de l’esprit en la recherche de la vérité. Traduction selon le lexique cartésien et annotation conceptuelle avec des notes mathématiques de P. Costabel, La Haye, Martinus Nijhoff, 1977.
− L’idole et la distance. Cinq études, Paris, Grasset, 1977 (ouvrage couronné par l’Académie des Sciences Morales et Politiques).

− J.-L. Marion, La croisée du visible et de l’invisible, in Trois essais sur la perspective, Editions de la Différence, FRAC/Poitou-Charentes, 1987, pp. 9-57.

− Sur la théologie blanche de Descartes. Analogie, création des vérités éternelles, fondement, Paris, P.U.F, 1981.

− Dieu sans l’être, Paris, Fayard, 19821. Ouvrage couronné par l’Académie Française. Puis P.U.F., “Quadrige”, 1991, éd. revue et augmentée, 2003 ; Id., Dio senza essere, Milano, Jaca Book, 1987.

− Sur le prisme métaphysique de Descartes. Constitution et limites de l’onto-théo-logie cartésienne, Paris, P.U.F, 1986, 396 p. ; Id., Il prisma metafisico di Descartes. Costituzione e limiti dell’onto-teo-logia nel pensiero cartesiano, Guerini, Milano, 1998.

− Prolégomènes à la charité, Paris, Éditions de la Différence, Paris, 1986.

− “Ce que cela donne”. Jean-François Lacalmontie, Paris, Éditions de la Différence, 1986.

− Réduction et donation. Recherches sur Husserl, Heidegger et la phénoménologie, Paris, P.U.F., 1989.

− Questions cartésiennes. Méthode et métaphysique, Paris, PUF, 1991.

− La croisée du visible, Paris, Éditions de la Différence, 1991 et  P.U.F., 1996.

− Index des Meditationes de prima Philosophia de R. Descartes (en collaboration avec J.-Ph. Massonié, P. Monat, L. Ucciani), Annales littéraires de l’Université de Franche-Comté, Besançon, 1996.

− Questions cartésiennes II. L’ego et Dieu, Paris, P.U.F., 1996,1 404p., 2002

Etant donné. Essai d’une phénoménologie de la donation, P.U.F., 1997, 1998, 2 éd., corrigée, « Quadrige », 2005 ; Id., « Dato che. Saggio di una fenomenologia della donazione, Ed. S.E.I., Turin, 2002.

− De surcroît. Etudes sur les phénomènes saturés, Paris, P.U.F, 2001.

− Le phénomène érotique, Paris, Grasset, 2003. Ré-édition en « Livre de Poche. Biblo-Essais », Paris, 2004

− Le visible et le révélé, Cerf, Paris, 2005.

 


PUBBLICATO IL : 27-05-2007


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